Le 10 septembre dernier, le groupe « Finances » de la promotion Gaston Monerville accueillait Marion Spegt, directrice adjointe des Finances à l’Eurométropole et la ville de Strasbourg, pour partager son expérience sur la mise en place de la dématérialisation des fonctions comptables au sein de cette administration mutualisée.
Cette évolution, qui répond à une obligation règlementaire, implique que les pièces justificatives à l’appui des mandats de paiement et des titres de recette soient transmises au comptable par voie électronique – les métropoles ayant dû s’y soumettre pour le 1erjanvier 2017.
Avec quelques 40 000 factures annuelles traitées par les services, un tel changement de paradigme nécessite une vraie révolution dans les méthodes de travail, impliquant dans un premier temps de scanner toutes les factures réceptionnées – en attendant que les entreprises soient toutes dans l’obligation d’envoyer directement ces documents par voie dématérialisée.
Plus largement, il a fallu réinterroger toute la chaine de traitement des factures, depuis l’engagement (qui implique l’inscription, dans la comptabilité, d’une facture à venir), en passant par la certification du service fait (la personne en charge du suivi de la commande devant attester de sa bonne réception), avant le mandatement à proprement parler (la demande de paiement de la facture au comptable public), qui doit être ensuite contrôlée et effectuée par le comptable du Trésor public.
Reconcentration des fonctions ressources
Un séminaire organisé en 2016 a permis d’aboutir à un diagnostic partagé entre les directions, première étape avant la mise en place d’une nouvelle organisation plus structurée et homogène. Les responsables ressources ont été centralisés au niveau de chaque grande direction ou entité jugée pertinente (parfois regroupant plusieurs directions, voire s’arrêtant aux services pour les plus grosses directions), exigeant de leur part davantage de polyvalence et une montée en compétences. Une remise en cause d’habitudes ancrées de longue date pour de nombreux services, comme la culture, qui fut l’un des pionniers de cette nouvelle organisation. Ainsi, plutôt que d’avoir un responsable comptabilité à l’orchestre, à la médiathèque ou encore au conservatoire, cette fonction est aujourd’hui centralisée à la direction de culture.
Ces évolutions ont logiquement entrainé l’acquisition d’un parapheur électronique, permettant aux quelques 850 agents opérationnels amenés à valider des factures de le faire directement en ligne. Des changements d’autant plus complexes à mener que les outils ne suivent pas toujours… les logiciels informatiques n’étant pas toujours à la hauteur de ces nouveaux besoins, compliquant d’autant la tâche. Difficile, dans ces conditions, de maintenir la motivation des équipes qui essuient les plâtres de ces bugs à répétition. A ce jour, si la nouvelle organisation a permis de supprimer quelques postes, les délais de paiement des factures ont plutôt augmenté ; l’objectif étant bien de les diminuer à terme.
Un processus toujours en construction
Cette conduite du changement à grande échelle s’avère d’autant plus délicate qu’il s’agit d’un processus long et évolutif. Il faut donc veiller à maintenir la cohésion en rappelant régulièrement que c’est en avançant ensemble que les équipes pourront affronter ces évolutions en cours – tout comme celles à venir : ainsi, le 1eroctobre prochain, ce seront les marchés publics qui devront être entièrement dématérialisés. Les collectivités sont les premières au front pour expliquer ces nouvelles modalités de transmission aux entreprises, qui peuvent avoir des difficultés à s’adapter, et ce alors que l’État diminue constamment ses moyens humains.
Les suppressions de postes en cours annoncent de nouvelles évolutions, susceptibles d’aboutir à un service facturé unifié, et potentiellement une fusion entre les ordonnateurs et les comptables. De nouvelles questions se poseraient alors, notamment en termes de responsabilités : aujourd’hui, le comptable est responsable personnellement et pécuniairement des factures qu’il valide. Ce rôle sécurise les responsables financiers des collectivités, qui signent eux-mêmes les journaux de paiement regroupant les mandats. Qu’en sera-t-il demain, si cette distinction entre les fonctions disparaissait ?
Céline Bretel, pour le groupe finances de la promotion Gaston Monnerville